DEAFplus
article imprimé
rédaction: Frankwalt Möhren
enche f. et m.
[ÉtymologieDu lt. ENCAUSTUM n. “encre” (dès ca. 400, ThesLL 52,556; cf. infra), de ENCAUSTUS adj. et s.m. “encaustique” (ib. [dernière att. fin 1ers.]; 71,850 [aj.: Not. Tir.](1)). Le sens de “encre” est continué par le mlt. (MltWb 3,1269 [att. dès 864]; LathamDict 1,777c); la var. mlt. encautum est attestée dep. le 9es., v. DC 3,264c (Gloss. lt.-gr., CGlL 2,61,36, ms. BN lat. 7651 fo60ro vérifié). Le latin lui-même est un emprunt au grec ἔγκαυστοσ adj. “burnt in, painted in encaustic” (LidScott 1,471b). Le mlt. connaît à côté de la forme encaustum (MltWb etc.) aussi, et plus fréquemment attestée, incaustum, une adaptation latine étymologisante (StotzLaut §92.2, avec sources(2)). Le transfert sémantique de ‘peinture à la cire pigmentée appliquée au pinceau et fixée à la chaleur radiante’ à ‘solution colorante indélébile servant à écrire et à dessiner’ est dû au perfectionnement et à la généralisation d’encres métallo-galliques aux premiers siècles de notre ère(3). Le tertium comparationis de cette métonymie est certainement l’incrustation partielle du liquide dans le support et l’indélébilité: les anciennes encres carboniques(4), au noir de fumée, aux résines calcinées ou au charbon de bois, étaient plus ou moins délébiles, restant sur la surface du support, surtout dans le cas du parchemin (et surtout de son côté poil). L’encre gallique, au contraire, est mordante, elle s’incruste par l’effet chimique d’acides tanniques et de sels métalliques. Le latin atteste le nouveau sens dès vers 400 (Augustin et Codex Theodosianus de 438, ThesLL 52,557,2; aj. Marcellus Empiricus, peu après 408: Gallas, de quibus encaustum fit(5)). – Pour justifier l’implantation du nouveau sens, les étymologues (Diez 1853, 193; WaldeHofm 1,404; EM1-4 ; FEW 3,225a; REW 2869; Gam2 367b; etc., aussi Zerdoun Bat-Yehouda, Encres, p. 28) se réfèrent au contraire volontiers à l’encaustum sacrum, l’encre rouge réservée par les empereurs byzantins pour leurs signatures (terme attesté dès 470(6); règlement dans le Code de Justinien de 534, v. ThesLL), mais le rôle de cette dénomination particulière pour l’étymologie d’encre paraît négligeable, surtout en considérant l’histoire de la chose attestée pour l’an 111, la motivation de la métonymie et le sens et la date de l’att. chez Marcellus. La désignation usuelle des encres carboniques avait été atramentum(7), en grec μελάν (proprement ‘le noir’), DCMGr 897(8). Le gallo-roman septentr. accueille encaustum avec l’accentuation proparoxytone greque éncaustum, tandis que l’it. inchiostro (dès av. 1294(9), Battaglia 7,673a; CortZol2 750c) résulte de l’adaptation lt. à la prononciation paroxytone encáustum / incáustum (KahaneSel 1,470; KahaneByz III b,3, col. 362). L’aocc. encau[s]t n’est p.-ê. qu’un emprunt (prob. 1em. 13es., Lv 2,392b; DOM; FEW 3,225a,I.2.). Le mnéerl. inct, var. inket, etc., néerl. inkt (dep. 1em. 14es., VerVer 3,883a), conservant le t, vient p.-ê. directement du lt. (proparoxyton) même en connaissance certaine du fr. (Philippa, Etym. Woordenboek, F-K, 2005, 528a, d’après FringsGR 171-173; pour Gam2 367b c’est, avec ball. (Westphalie) inket, moyen frq. inct (12e/13es., EWA 5,96-98) et all. de la Renaissance inke (ib.) un emprunt direct au latin (REW 2868: reprise du latin de Trèves). Cp. encore mha. inkešte (GlLeipzigBa 7907), tchèque inkoust, polon. inkaust, etc. (EWA). Pour Philippa, le néerl. mod. ink, var. enc, tous les deux obsolètes, proviendraient du fr.). Le mangl. enke (dès ca. 1250, MED 5,193a, aussi enker[-grene], “vivid green” selon MED, mais plus prob. “vert encre”, cp. encre comme apposition, infra) emprunte l’afr., mais mangl. angl. ink (MED; OED3) semble montrer du moins l’influence du latin (toujours proparoxyton). Le type afr. anket, de tradition hébr., est archaïsant (FEW 3,225b, n.6) ou témoigne de la tradition rhénane mentionnée; (judéo-)occ. enkest (Blondh 46; REW 2869) est attesté dans le Codex Farhi (1383; Sassoon 368voDYN), témoignant p.-ê. de l’influence rhénane sur l’écriture sépharde (cf. Kogman-Appel dans Del Barco et al., Late medieval Hebrew book, 2015, 158). L’it.mérid. inga, var. inca, enca (Cortelazzo et Marcato, I dial. it., 1998, 237) et tosc./Ascoli ancro (1327; rime avec Cancro; TLIO) sont empruntés au fr. Il semble indiqué de distinguer en afr. trois types phonétiques, enche, à la consonne affriquée palato-alvéolaire sourde [tʃ], enque, à l’occlusive sourde vélaire [k], qui témoigne d’une intégration partiellement tardive du terme lt. (dépendant du passage de [k] devant [a] à [tʃ], vers le 6e-7es.), puis le type encre, à r adventice (sans compter le anket discuté supra). La qualité des graphies à ch et c est difficile à établir. En pic. et en agn. leur prononciation comme [k] est possible (GossenGramm p. 98; Pope §694; 701; 1209), même certaine dans le cas de enca, Alexis ms. L, agn. ca. 1120. Les rimes peuvent suggérer une prononciation affriquée, p.ex. anche rimant avec va[n]che “venge” et vanche “pervenche”(10), RicheutV 114-116, ou avec detranche, DolopL 3526; cette prononciation est confirmée par les dial. wall. (FEW) et le frpr. ịntso (GlSuisse 6,394a). Les graphies k, q et qu certifient la prononciation [k]. L’introduction d’un r ‘extra-phonétique’ est expliquée par FouchéPhon 758 comme contamination, sans que ses ex. soient toujours convaincants (type rusticus > rustre d’après illustre; encre n’y est pas; cp. encore → venche “pervenche” DEAFpré, var. vencre 16es., Gdf). Pour l’explication du r dans encre, il faut considérer la var. afr. incle et le mlt. inclaustrum (Bologne 1250-1267, DC 4,322a) et inclure l’it. inchiostro (CortZol2 750c; Pézard R 80,408-409; surtout RohlfsItGr §333: particulièrement fréquent après t, ‘cf. anatra, balestra, inchiostro…’). Cp. encore → enchoistre et enchotir.
Rem. no 1: Gdf 3,121b établit un article encré adj. “couleur d’encre, foncé” documenté par trois doc. datés de 1300 à 1361 (une att. n’en porte pas d’accent, trois le portent, ajouté par l’éditeur moderne). Le FEW 3,225a suit Gdf, définissant “foncé”. TL 3,262, sans att., renvoie à Gdf et FEW. DMF (Cromer), basé sur Gdf et FEW, crée un article encré citant l’att. de 1361 de Gdf. Pck 2 (1951) 62, au contraire, avait établi une vedette encre, tout en renvoyant à Gdf encré. Il faut sans doute interpréter ces att. comme témoins d’encre en fonction d’apposition indiquant une certaine qualité d’une couleur (emploi particulièrement usuel pour qualifier la couleur d’un drap). V. sous enche, infra(11).Rem. no 2: ANDEl introduit deux significations nouvelles (par rapport à AND) s’appuyant uniquement sur des gloses: “ink-horn” (incaustrum glosé par enke et atramentario par nert, enke) et “ink-fish” (lolligine glosé par henke, tench [“rémora, Echeneis naucrates”?, v. MED 10,204, pas “tanche” (att. ca. 1450 très dout.)]). Ces interprétations seraient à étayer par des att. probantes (12), car les gloses sont généralement des témoins fragiles: la mécanique des gloses implique qu’elles ne doivent jamais être prises pour des traductions et, a fortiori, pas pour des définitions; une glose commente (parfois par une traduction) ou nomme un concept pouvant être voisin, distant ou même opposé. L’ANDEl lui-même ne définit pas la seconde glose du même passage, nert, *“encrier”, mais bien “black pigment, ink” (sub neiret)(13).
]
(enche SJeanAumU 6697; ChirRogH I,xxxiii,10; HuonabcL 88; CoincyII25K 484 var. ms. pic. 2em. 13es.; CoincyII33K 94, anche RicheutV 116; DolopL 2709; 3526; LionBourgAlK 31114; [GuillMachVoirI 8040], ⁠pic. ainche Aspremp ms. BN fr. 2495 fo 122r,20, ence CoincyII25K 484, ⁠s.l. enque AlexParA IV 812; SJeanBoucheD 227; AndréCoutP 914; DoonMayP 10837; RutebTheophFa 653; MarqueA gloss. (faux renvoi); DenierBrebis ms. fo 268roa; MailleM 89; AlexisS2 281 var. ms. agn. P; LancPr ms. Frib. Gdf; CoincyII25L 484 ms. Soiss. déb. 14es.; HMondB 2205; doc. Paris 1323 Noster DC; CoincyII33K 94 var. ms. 2eq. 14es.; ProprChosMirK XXXI 36; MirNDPers6P 710; 712; [cpt. 1400 a.st. DouëtHotel 97; GlLag1499 impr. Tréguier 1499 L ante I; ] etc.etc.TristBérG 2429, enke MarieMilW3 254; SJeanAumU 7665; RègleCistG p. 535, fo 144v; AlNeckUtensH 168; EvNicPrbF 454; LettrHippomS fo 83vo; ChirRogH I,xxxiii,7; JGarl HuntTeach 2,153; HuntTeach I 322; JGarl HuntTeach II 153 (25); EvNicChrP 1397; SJeanBoucheD 227; BrittN 1,314; AlNeckUtensH2 79 (168) mss.CL; HuntTeach I 320, enca fin 11es. AlexisS2 281, ⁠agn. henke AlNeckUtensH2 78 (163); 79 (168); etc.78 (163), ainque AlexParhM 520,17var., ⁠s.l. anket(14) GlBâleB 3931; GlLeipzigBa 7907; FevresS 153r16 p. 80; GlTurin2 LevyTrés; GlStrasB 286, encre 1ert. 12es. LapidffS 264; CharroiPo 1149; LapidfpS 99,16; EneasdP 8831; Aiol2F 9292; AntiocheN 8483; SJeanBoucheD 427; NatndBNfr818R 36; LapidvaS 518; BrunLatC II 130,1var.; AlexParhM 502,10; BenTroieC 21606 var. ms. 1285; doc. 1300 Thierry 4,67; doc. orig. Saint-Omer 1305 EspPirDoc no 653, p. 272,22; YearbEdwii ANDEl; doc. 1311 Test. de Mar. de Hain. Gdf (2 att.); Taille1313M 38b; doc. 1318 PiérardMons 1,585,21; etc.etc.EspVal no 57,14, p. 78; [cpt. 1387 DouëtNArg 294; cpt. 1400 a.st. DouëtHotel 160], enqre doc. Rouen 1297-1298 CptRoyF 24685, ⁠lorr. ancre EneasS2 8776, ⁠s.l. encquere MenagP 2,274, ⁠bourg. engre cpt. [Nevers] 1394 GdfC, aincre GirRossAlH 1337, ⁠lorr. incle CoutVerdun1M IV 24, ⁠s.l. [encri, adaptation it.]⁠ [doc. 1294] Bautier Bull. Soc. Hist. Fr. 81/1945 (1947) 99-100)
  • “solution colorante indélébile servant à écrire et à dessiner (au noir et à d’autres couleurs), encre” (dep. fin 11es., AlexisS2 281 [Quer mei, bel frere, ed enca (c = [k], v. éd. p. 46; AlexisF col. 129 ms. P enque) e parcamin Ed une penne]; CharroiPo 1149; EneasdP 8831; MarieMilW3 254; Aiol2F 9292 [li clers… fist une candeille devant lui atachier, Prent encre et parchemin, si lor escrit .i. brief]; RicheutV 116 [Escrivez brief de sanc et d’anche, rime avec va[n]che “venge” et vanche “pervenche”]; AlexParA IV 812 [bons rois conquereres doit tous jours porter enque Et pene et parkemin ou sa vie soit painte (laisse en -ainte; = AlexParhM 520,17var. ainque)]; AlexParhM 502,10; 520,17var. [ainque; = AlexParA IV 812 enque]; AntiocheN 8483; SJeanBoucheD 227 [encre (var. mss. pic. BC enke) plain cornet]; 427 [Tout ton encre as perdu]; SJeanAumU 6697; 7665; AndréCoutP 914; GlBâleB 3931 [anqet, glose Ier 36,18]; RègleCistG p. 535, fo 144v [De le mestre des novisces… Ele doit… avoir l’enke aparellié por faire le crois, ch. 119, lt.: ad crucem imponendam incaustum preparatum habere, cod. Trient, éd. Griesser cap. 135 [113]]; DolopL 2709; 3526; CoincyII25K 484 [Trop convenroit ence (ms. pic.mérid. déb 14es., var. ainche ms. frc. fin 13es., enche ms. pic. 2em. 13es.) en mon cor]; CoincyII33K 94; AlNeckUtensH 168; NatndBNfr818R 36; CoutVerdun1M IV 24 [Or ai ma incle atrempee, ms. 15es.]; LettrHippomS fo 83vo; ChirRogH I,xxxiii,7 [merchiez od enke (sur la peau du malade)]; I,xxxiii,10 [E faites de l’un signe jesque a l’autre d’ambesdous parz merc d’enche]; DoonMayP 10837; HuntTeach I 322 [incaustum : enke]; JGarl HuntTeach II 153 (25) [atramentario : nert, enke, ms. mil. 13es.; cf. JGarl ms. Bruges GdfC]; RutebTheophFa 653; HuonabcL 88 [li trais Qui par mi l’effe est d’enche trais, ms. art. C]; MarqueA gloss. (faux renvoi); BrunLatC II 130,1var.; Aspremp ms. BN fr. 2495 fo 122r,20 [pris penne et ainche et parchemin]; CoincyII25K 484 var. ms. pic. 2em. 13es.; EvNicChrP 1397; DenierBrebis ms. fo 268roa [un livre… D’enque estoit et de parchemin]; MailleM 89 [cornetes a metre enque, rimant avec venque “pervenche”]; AlNeckUtensH2 79 (168) [incaustum : la henke / enke (mss. fin 13es. et déb. 14es.)]; LancPr ms. Frib. Gdf; BrittN 1,314; doc. Rouen 1297-1298 CptRoyF 24685 [Pour parchemin, pour enqre, pour papier et pour escripture: 4 l. 14 s. 7 d.]; FevresS 153r16 p. 80 [translitt. énkét]; AlNeckUtensH2 78 (163) [lolligine : henke]; GlTurin2 LevyTrés; YearbEdwii ANDEl; HMondB 2205 [nous faison environ l’escrescence un cercle de enque ou semblable (description des préparatifs d’une opération chirurgicale)]; doc. 1318 PiérardMons 1,585,21 [Paiiet a… pour parkemin et encre]; GirRossAlH 1337; MirNDPers6P 710; 725 [E! royal vierge debonnaire, Dame plaine d’umilité, Ce Sathan mon enque a tumbé; Or n’ay je de quoy puisse escripre Ce que de vous vouloie dire]; HuntTeach I 320; LionBourgAlK 31114; [cpt. [Nevers] 1394 GdfC; cpt. 1400 a.st. DouëtHotel 97 [bouteille d’enque]; DouëtHotel 160 [boutaille d’encre, passim]; GlLag1499 impr. Tréguier 1499 L ante I [Liu da scruiuaff .g. encre (impr. ēcre) ou cuque (l. enque) a escripre hoc encaustum/sti, vel incaustum (impr. incaustū) /sti]; ] etc.etc.ProprChosMirK XXXI 36 [Un cornet d'enque a son col mis]; EvNicPrbF 454; doc. Paris 1323 Noster DC; AlNeckUtensH2 78 (163) [lolligine : henke (ms. déb. 14es.); lt. ib. 1,187: clericus navis qui cornu et lolligine ibidem est necessarius]; JGarl HuntTeach 2,153 [atramentario : nert, enke]; GlLeipzigBa 7907 [Ier 36,18]; GlStrasB 286 [translitt. akét; Ier 36,18]; [MenagP 2,274 [recette: Pour faire encquere sans bouillir]; TristBérG 2429], TL 3,199; DC 3,264b; Lac 5,392a; GdfC 9,455c; Blondh 46; LevyTrés 19a; DMF; TLF 7,1052a; FEW 3,224b)
  • ⁠id., comme terme de comparaison avec la couleur noire“” (12851579, BenTroieC 21606 var. ms. 1285 [(un blessé est) [Plus neir] que pois ne comme encre], Ziltener no 703; DiStefLoc2 1,582b; DMF)
  • encre comme apposition qualifiant un nom de couleur: vert encre “vert tirant sur le noir, vert encre”, pers encre prob. “bleu très foncé, noir bleu, bleu encre” (cf. la Rem. 1 supra)⁠ (1ert. 12es.1449(15), LapidffS 264 [s’il la volt encre vert faire (l’éméraude, en la traitant au vin et à l’huile)]; LapidfpS 99,16 [ele (l’éméraude) amended les oilz a celui ki l’esguarded, e ele osted tempeste et luxurie, et ele devient plus encre verte, si home la levet en vin et puis est uincte de olie vert]; LapidvaS 518 [E ben la velt encre vert faire, En vin la leve il e la moille E si l’oingne ben de vert oille.]; [doc. 1294] Bautier Bull. Soc. Hist. Fr. 81/1945 (1947) 99-100 [(liste de draps fr. achetés à la foire de mai de Provins, aux noms adaptés à l’it. du doc.) 10. .ij. verdi encri di Doagio (= Douai); 15. .iiij. verdi encri, da Perisone di Churi di Cialo (= Châlons); 16. .iiij. verdi encri; 17. .iij. verdi smiraldini; 21. (.xij. persi) encri; 22. .iij. persi encri]; doc. 1300 Thierry 4,67 [que on ne mete en un drap que trois los de seym, fors que es pers encres, es (éd.: pers, encres es) blancs et es meslés]; doc. orig. Saint-Omer 1305 EspPirDoc no 653, p. 272,22 [Draps acatés:… un encre piers mellé de graine,… un cler bloi mellé de graine]; doc. 1311 Test. de Mar. de Hain. Gdf (2 att.) [quatre pieces de vert encre (Gdf: encré)…; chappe de vert encre (Gdf: encré)]; EspVal no 57,14, p. 78 [(le drap) ne il doit mie estre copés por encre ne por cler, ajout par une main mil. 14es.(16)]; [doc. 1361 Gdf [deux petites escroes de drap, l’une de pers encre (Gdf: encré), et l’autre de pers asuré (ainsi Gdf)]; cpt. 1387 DouëtArg 273 [4 aulnes et demie de vert encre de Brucelles… pour faire deux houppelandes (énumération de draps: ellipse)]; DouëtNArg 294 [houppellandes de drap vert encre de Broixelles, et doublees d’une autre vert plus claret]; JournParT no 269 p. 137 [la tainture estoit si chere que une aulne de drap a taindre en vert ancre coustoit .xiiij. solz parisis, et autres couleurs a la value]], Gdf 3,121b [sub encré]; TL 3,263,40 [sub encré, renvois à Gdf et FEW]; ANDEl [établit un syntagme encre vert, «[coulour] (quasi-a.) “ink-green, bright green”», ce qui n’est pas appuyé par les contextes]; DMF [sub encré (Cromer)]; Pck 2,62, 299,2o; Medieval Clothing 10, p.p. Netherton et al., 2014, 43; FEW 3,224b)
enquin adj. substantivé
[ÉtymologieSurnom, ou encore désignation d’une profession, à l’étymologie incertaine, car l’analyse du sens s’appuie sur l’étymon supposé et pas sur une analyse de contexte (la Taille étant une simple liste de personnes contribuables à Paris, souvent avec la mention de sa profession). Le suffixe -in est présent dans des termes comme ferrin, acerin, sanguin, coquin, mais sa valeur (relative ou dépréciative?) ne peut pas être déterminée en partant de l’attestation isolée (cf. MLFrGr II2,131; TLF 9,1294a). L’éd. annote «Le sale? inquinatus.», sans convaincre (cf. FEW 4,706b). L’Evrart en question n’apparaît pas dans Taille1296M ca. p. 152. Cp. encore Adam crassin, Taille1297M p. 383).]
  • “celui qui est mis en relation avec de l’encre (fabriquant, scribe ou, par plaisanterie, qn. au teint ou aux cheveux noirs?)”?, surnom ou désignation d’un professionnel⁠ (1292, Taille1292G p. 102b [Evrart li enquin], PachnioTaille p. 24 [‘de la couleur du teint ou des cheveux?’]; ad FEW 3,224b)
mfr. encrier m.
  • “vase où le scribe puise l’encre” (souvent un cornet)⁠ (dep. 1380, inv. 1380 InvMobChL 2273 [Item, ung hault encrier d’ybenus, qui fut fait anciennement pour faire unes balances]; inv. 1380 LabordeGl 261 [encrier d’argent doré (Inv. Charles V; à identifier)]; doc. 1416 LabordeGl 261; inv. 1418 DouëtChVI 2,306, no153 [Un encrier d’argent doré, hachié a fleur de liz. Pesant iii marcs deux onces (Inv. de joyaux roy.(17))]; 2,356, no537 [Un encrier d’argent doré, hachié a fleur de liz. Pesant quatre marcs, une once, dix esterlins], Lac 5,354b; GdfC 9,456a; TLF 7,1054a; FEW 3,224b)
encriere f.
(encriere 1313 Taille1313M 45d)
  • “celle qui (prépare et ) vend l’encre”(18) (1313, Taille1313M 45d [Aaliz l’encriere])
(1) La technique de l’encaustique se perd au 3es. selon Cockle dans Bull. Inst. Class. St. London 30 (1983) 150.
(2) Aussi 12es. (en Pic.) Canon. Arroasiensis, éd. Milis 1970, 13,3 [Nullus ingrediatur coquinam excepto … scriptoribus ad planandam tabulam, ad liquefaciendum incaustum (devenu épais ou conservé à état séché), ad exsicandum pargamentum], Crémone fin 14es. Folchinus de Borfonibus, éd. De Santis 2003, 2,2,686 [Hoc encaustum et incaustum, tinctura scribendi sic dicta ab en uel in et caustos, ‘incensum’ siue ‘inustum’]; HuntTeach ne relève que incaustum.
(3) Faites essentiellement en partant de galles séchées, pulvérisées et macérées en ajoutant du sulfate ferreux (vitriol, aussi cupreux) et de la gomme arabique. Il n’y a pas de calcination, mais normalement une cuisson (cf. p.ex. la recette dans MenagP 2,274, ms. C de ca. 1475).
(4) Elles existent encore sous le nom d’encre de chine, et sont toujours employées, p.ex. en Grande Bretagne pour les registres de mariage (Cockle dans Bull. Inst. Class. St. 30,150).
(5) Dans une recette ‘Ad splenis dolorem remedium efficax’, éd. Niedermann 1968, 398,20. Marcellus avait été un haut fonctionnaire près de Theodosius II à Constantinople; il venait prob. de la Gaule méridionale. La possibilité de faire une encre invisible avec l’extrait de galles, puis rendue visible avec du sulfate de cuivre, l’atramentum sutorium, apparaît chez Philon de Byzance (ob. 220 av.), puis il y a une mention comparable chez Pline l’Ancien, un emploi magique chez s. Hippolyte, 3es., la première recette de fabrication se trouvant sur le Papyrus V de Leyde (grec, ca. 3es.), v. M. Zerdoun Bat-Yehouda, Les encres noires, 1983, 91-95, pour l’aspect chimique Wunderlich dans Restauro 100, 1994, 414-421. La première att. matérielle est donnée par l’emploi d’encre gallique sur un papyrus de l’an 111 (v. Thomas dans The Oxyrhynchus Papyri 44, 3197, p. 169, n.1).
(6) EWA 5, 2014, 96, définit l’étymon lt. résolument “purpurrote Tinte”, prob. d’après WaldeHofm. Pour l’encaustum sacrum v. Bresslau, Urkundenlehre, 2, 41968, 506 [encre rouge employée aussi par Charles le Chauve, par les seigneuries lgb. de Capoue et Bénévent et par Roger II de Sicile]; Dölger et Karayannopulos, Byz. Urkundenlehre, 1, 1968, 28-30; LexMA 8,797; Burkhardt, Medit. Kaisertum, 2014, 204 [chancelliers flamands à la cour de l’empereur Henri Ier du Hainaut à Constantinople; signatures rouges sur le contrat de 1207 par Henri Ier et Marino Zeno].
(7) P.ex. calamo et atramento Cicéron Quint. Fr. 2,15, atramentum librarium Pline l’Anc., Nat. 27,51 [4,245], Eumolpus tamquam litterarum studiosus utique atramentum habet Pétron Sat. 102,13 [106,6], atramentum scriptorium Celse Medic. 8,4. V. → arrement DEAFpré.
(8) LidScott n’enregistre que ἄλαβα, mais c’est un hapax legomenon, v. Kramer, Arch. Papyr., Beih. 30, 2010, 176.
(9) Brun. Lat., var. ib. incostro.
(10) Ce mot connaît aussi les graphies venque et venke, v. Gdf 8,166a, MailleM 89 cité infra et → venche DEAFpré.
(11) Expression confirmée par le mangl. enker-grene, mentionné supra, MED 3,159a [déf. et étym. à revoir]; OED E 189a [afr. encré prob. inspiré de Gdf: à corr.].
(12) LathamDict 1,1637c lolligo 1.b. n’étant pas une preuve. Texte lat. de AlNeckUtensH2 78 (163): clericus navis qui cornu et lolligine ibidem est necessarius (HuntTeach 2,187; cf. le même cas dans JGarl HuntTeach 2,153); lolligo pourrait se référer à l’os de seiche servant à poncer le parchemin.
(13) On peut ajouter que le r dans incaustrum n’indique pas une dérivation, mais qu’il représente le r adventice discuté supra.
(14) Sources à écriture et tradition hébr.; pour la finale cf. la discussion supra.
(15) Existe dans le voc. actuel (2019): jupe vert encre; faïence vert encre. Il n’est pas nécessaire d’y voir une continuité.
(16) Pck attribue à cette att. le sens de “teinte trop foncée, opp. à cler”; nous hésitons à considérer cet emploi comme lexicalisé (cp. cler ib. 2,40: même cas).
(17) C’est prob. le même objet que celui de l’inv. 1380 cité par LabordeGl.
(18) L’encre pouvait se conserver comme poudre sèche, pour être confectionnée au besoin. Cf. le contexte cité dans la note 2, supra, et celui dans CoutVerdun1M IV 24, cité.