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rédaction: Thomas Städtler
fissel m.
[ÉtymologieWartburg, FEW 14,530a, propose, dans la suite de Meyer-Lübke ZrP 15,246, comme étymon de ce mot un subst. lt. *VISSIO “mauvaise odeur”, qui serait un déverbal de vissīre “lâcher une vesse”. *Vissio n’est cependant attesté que dans deux glossaires, dans un glossaire latin-grec du 9e siècle sous la forme visio (quant à la simplification des géminées, Stotz VII 278,1 parle d’une «Tendenz, die im Vlat.-Rom. am Werke ist») avec le correspondant grec βδόλος “mauvaise odeur, puanteur” (CGlL 2,209,51), à côté de βδεςμα : vissium “id.” dans un glossaire grec-latin du 7e siècle (CGlL 2,256,48)(1). La désonorisation de la consonne initiale du mot français est expliquée par une assimilation à la consonne finale sourde de la racine du mot latin (Horning ZrP 18,230)(2). Notons toutefois que dans la famille de vissire il n’y a aucun représentant à l’initiale sourde. – Le mot qui appartient à la famille de l’indo-européen ṷeis “fondre, couler” (Pokorny 1134) vit aussi dans le sud de la Galloromania, cp. fišęu (Landes, Pyrénées-Atlantiques) et fisseu (Landes 1734, FEW 14,530a). – Emprunté au fr: mangl. ficheux (dès ca. 1418, MED 3,543b), mnéerl. fitsau (2em. 14es., VerVer 2,817).
Rem.: Dans AdHaleSicG1 211-212 on lit: Il (le héros) ne raportoit mie a l’ostel ses labliaus (bouts de tissu décoratifs); Le plus sovent metoit sen content as fissiaus. Dans son édition des œuvres complètes d’Adam de la Hale, Badel traduit ce dernier vers: ‘Le plus souvent il s’employait à chasser le putois’, p.-ê. en suivant AdHaleLexM 86b où le mot est défini “chats sauvages” et est attribué à la langue de la vénerie. En réalité, le mot est à identifier avec fissel “récipient de petite taille fait de vannerie, corbeille” (v. ici sub → fissele), et nous avons prob. affaire à une loc.verb. metre (aucun) as fissiaus “vaincre (qn)”, cf. ib. note 3.
]
(fissel 2eq. 13es. LettrHippomS 80ro17 [c.r. sg. -eu], fissiel RenNouvR 5221 [c.s. sg. -iaus]; RentSNicM 27; 170; 172; 174 [c.s. sg. -iaus, c.r. sg. -iel]; 181; 326; doc. Lille 1333 M. Aubry, 4000 bourgeois de Lille au XIVes., p. 46 [c.s. sg. -iaulx]; [doc. Douai 1446 DC [c.r. pl. -iaulx]], fichel DialFrFlamG p. 12 [c.r. pl. -au])
  • “petit mammifère carnassier à odeur nauséabonde de la famille des Mustélidés, putois” (2eq. 13es.Cotgr 1611(3), LettrHippomS 80ro17 [Pour goute. […] Prendés saïm de taisson et de cat et de fisseu et aus, trivlés ensanle et metés en  .j. lange drap et puis oigniés le mal au fu]; RenNouvR 5221 [Pusnais, li fissiaus, dont sali En le nave au roi, et saisi Cantecler qui estoit pasmés]; [DialFrFlamG p. 12; doc. Douai 1446 DC [v. le contexte sous fisseliere ci-dessous]], TL 3,1812 [renvoie à voison]; 3,1883; 11,682 [donne un article *voison, sans attester une telle forme, avec l’att. de DialFrFlam où figure fichau, v. supra]; Gdf 3,782a; 4,13b; DC 3,513c; DMF; FEW 14,530a [encore dial. mod. nord et nord-est])
  • “id.” (employé comme surnom)⁠ (1325; 1333, RentSNicM 27 [Gillion le Fissiel]; 170; 172; 174 [Jehans li Fissiaus, fius Hubiert le Fissiel pour l’iretage qui fu le dit Hubiert sen pere en le Hamerie, .j. fierton]; 181; etc.; 326; doc. Lille 1333 M. Aubry, 4000 bourgeois de Lille au XIVes., p. 46 [Hubiers li Fissiaulx filz Gillion])
mfr. fisseliere f.
  • “piège pour prendre les putois” (doc. Douai 1446 [une fisseliere a prendre bestes que on appelle fissiaulx DC], DC 3,513c [fissina]; Lac 6,223a; Gdf 4,14a; TL 3,1883; DMF; FEW 14,530a [«wohl pic. 1420»])
(1) Rien dans les dictionnaires du latin; rien dans les matériaux du ThesLL. Les att. de la forme vissio sont toutes des formes verbales de l’ind.prés. 1 de vissire (aimable communication de M. Ramminger, ThesLL).
(2) Millardet 241 attribue, sans explication et apparemment à tort, les formes françaises et gasconnes à un possible emprunt à l’all. Wiesel: «Le fait que ald. Wiesel, dont l’étymologie est obscure…, est peut-être lui-même un emprunt au latin… n’exclut pas pour les formes françaises et gasconnes la possibilité d’un emprunt au germanique». Suolahti (Mélanges Sievers 107ss.) suppose, à tort, que l’étymon des mots fr. et all. soit un germ. *wiso, *wisjo, et que anord. fisa "péter" ait influencé le changement de la consonne initiale (v. FEW 14,531a).
(3) “Il me semble bien que nous sommes devant un mot régional dont l’aire médiévale couvre essentiellement la Flandre, et peut-être un peu aux alentours.” (Communication de Gilles Roques).