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flor2 f. et m. (?)
[ÉtymologieDu lt. FLUOR, -ŌRIS m. “écoulement (d’eau, de fluides corporels, de selles liquides, etc.)” (ThesLL 61,976, déjà ancien comme t. d’hydrol. et de méd.); le mlt. conserve mot et sens, v. LathamDict 1,968a; MltWb 4,335.
Lt. fluor, ayant tôt pris la forme flor (StotzLaut §59.1), se distinguait mal de flor “fleur”, surtout comme le genre de la troisième décl. n’était pas stable (StotzForm §72.6-8) et comme l’identification sémant. du sens “règles” (devenu l’unique, mais v. RecCulChicS et RecMédEupH, infra) avec “fleur” paraissait naturelle (BarbierProc 2,31-32)(1). Le genre a suivi cette réinterprétation (partielle): le masc. persiste en mlt. (p.ex. mulier habet flores suos, ms. ca. 1300, HuntMed 252,121;151), mais pour l’afr., tex flors pl., TrotulaTrinH 35, ou flors vermaux, ib. 368+, ne sont pas probants (mss. agn., et tex pourrait être un pl.f.). La désignation s’emploie presque toujours au pl., tout comme menstrues(2) (v. → menstru); sg.: TrotulaTrinH 225 (pour 22 et 24 cf. la n.1) et prob. FevresS 159b-19.
L’occ. flors pl. “règles” est att. dans une trad. du Sidrac (fin 13es., Lv 3,509b sub flor “fleur”; se lit aussi dans BN fr.1158, v. cit., infra, SidraclR). Le frpr. ancien flours pl. (14es.; 1611) se dit auj. flueurs (GlSuisse 7,563b); isolé par son sens: mfr. (domaine frpr.) flours de mer pl. “flots de mer”, 1420 RecCulChicS fo 32ro,-3, Mts 1565b. L’it. connaît également fiori pl. “règles” (dep. 1ert. 14es., Battaglia 6,14b; TLIO(3)), prob. autochtone. Mangl. flour, angl. flowers pl. (dep. 1373 Macer, MED 3,659a, 6.; OED F 352b, 2.b.) provient du fr. et du mlt.
Rem. no 1: Comme les règles étaient tabouisées comme auj., il y avait certainement nombre de synonymes dont on connaît certains: en flux femenin c’est a dire en flux menstrueux AmphYpP V 56,2, ses semaines PlacTimT 305, privee maladie AldL 29,29, maladies secrettes PlacTimB4T 265, etc.(4). Le tabou a sans doute favorisé l’identification de flor “écoulement” avec flor “fleur” (v. n.1), entérinée au plus tard par l’apparition de la relatinisation flueurs f.pl., attestée dep. Est 1552, v. Gdf 4,40a; FEW 3,644a, II.1, et par l’emploi de menstrues comme terme scientifique. L’att. de fleurs vermeilles, CoincyI44K, se compare à mfr. fleurs blanches, DMF et FEW 3,644a (aj. fleurs rouges, Paré, Li 2,1700b, aussi Enc 6,861a). Cf. roses blanches “leucorrhée” Cotgr 1611, FEW 10,480a. Flors vermaux n’est p.-ê. pas identique, v. infra.Rem. no 2: AmphYpL2 VI 34,158a flueur se distingue dans ce texte de fleur (III 28; etc., v. infra) par sa forme et son sens: il reprend lt. mlt. fluor avec son sens originel. Contexte: (la calvité est en rapport avec les variques:) devon nous dire que, quant telles variques par flux ou decours de sang ou des humeurs qui descendent des parties d’en haut, especialment du chief, a telles voines, que calvité ou depillacion de chief, qui est tout un, leur vient, et par especial quant telle flueur dure longuement;… flue et decourt. Il n’est pas exclu que ce mfr. flueur ait pu être interprêté comme dér. fr. de → fluer. Cf. DMF flueur.]
Rem. no 1: Comme les règles étaient tabouisées comme auj., il y avait certainement nombre de synonymes dont on connaît certains: en flux femenin c’est a dire en flux menstrueux AmphYpP V 56,2, ses semaines PlacTimT 305, privee maladie AldL 29,29, maladies secrettes PlacTimB4T 265, etc.(4). Le tabou a sans doute favorisé l’identification de flor “écoulement” avec flor “fleur” (v. n.1), entérinée au plus tard par l’apparition de la relatinisation flueurs f.pl., attestée dep. Est 1552, v. Gdf 4,40a; FEW 3,644a, II.1, et par l’emploi de menstrues comme terme scientifique. L’att. de fleurs vermeilles, CoincyI44K, se compare à mfr. fleurs blanches, DMF et FEW 3,644a (aj. fleurs rouges, Paré, Li 2,1700b, aussi Enc 6,861a). Cf. roses blanches “leucorrhée” Cotgr 1611, FEW 10,480a. Flors vermaux n’est p.-ê. pas identique, v. infra.Rem. no 2: AmphYpL2 VI 34,158a flueur se distingue dans ce texte de fleur (III 28; etc., v. infra) par sa forme et son sens: il reprend lt. mlt. fluor avec son sens originel. Contexte: (la calvité est en rapport avec les variques:) devon nous dire que, quant telles variques par flux ou decours de sang ou des humeurs qui descendent des parties d’en haut, especialment du chief, a telles voines, que calvité ou depillacion de chief, qui est tout un, leur vient, et par especial quant telle flueur dure longuement;… flue et decourt. Il n’est pas exclu que ce mfr. flueur ait pu être interprêté comme dér. fr. de → fluer. Cf. DMF flueur.]
(flor LapidclS 470; 855; PlatPractH XIV 1 (HuntAgnMed 1,242); ChirAlbT 10roa; etc.; TrotulaTrinH 35; passim; LapidffS 662 mss. bourg. fin 13es. et art. 1277; SidraclR 406; PlacTimT 305, flour HMondB 445; Malad. des femmes R 32 (1903) 101; [RecMédTrinH 261], fleur CoincyI44K 451; LettrHippomS 73ro,3; 84ro,4; 84ro,10; TrotulaTrinH 22; 24; 32; RecMédCambraiS 81, p. 261; 85; RecMédGardH 3-4; PlacTimT 284; 295; 303; ChirPoutrS 46ro,1;23; HMondB 53; etc.etc.[AmphYpL III 28, fo 72b; AmphYpP V 32,5 fo 125ro; V 33,1-2 fo 125ro; V 33,6 fo 125ro; V 36,1 fo 126roa; doc. 1390 RegChâtD 1,336,-3; PlacTimB4T p. 260; 268; 270; RégSantélC 113r], agn. liég. champ.mérid. flur(5) 1ert. 12es. LapidffS 662; RecMedQuifH 448; MédLiégH 625; FevresS 159b-19 (sg.?); 149b-3; 156-24; 218b-10 (pl.); RecMédEupH 142,31; 166,122; RecMédAvenceH 81)
- ◆t. de méd. “écoulement de sang de la menstruation, règles”, presque toujours au pl. (dep. 1ert. 12es., LapidffS 662 [(ematite) Les flurs (var. flors mss. bourg. fin 13es. et art. 1277) restreint kant trop en a]; LettrHippomS 84ro,10 [Se la feme a trop de ses fleurs]; ChirAlbT 10roa; etc.; TrotulaTrinH 22-24 [nature… Doné lor (aux femmes) a un grant espurgement, Dames l’apellent ‘fleur’ par engendrement. Ne poet conceivre… Femme nesune sans fleur apparisant, v. n.1, supra]; 32; 35; passim; MédLiégH 625 [Olifans ivoires est buns… A la femme ki trop at de ses flurs est buns(6)]; RecMedQuifH 448; RecMédCambraiS 81, p. 261; RecMédGardH 3-4 [Li seaus de amur est li lius… par iloec nescent les flurs ky nescent a lur termes. De icés flurs ad l’um suvent trop, suvent trop petit]; SidraclR 406 [quant la feme est grosse ele ne a nules flors… flors, = SidracH 18,276 flors reconstruit; trad. occ. ms. BN fr.1158 fo 85vob,12 cant ela es en tal estamen ela non a pas flors ]; etc.etc.; PlacTimT 295; ChirPoutrS 46ro,1;23 [retention de fleurs; retencions de fleurs]; FevresS 149b-3; 156-24; 218b-10; 159b-19; RecMédEupH 142,31 [(par la melancolie) tut le cors ensecchist… e les flurs cessent e emorroides (fluides corporels divers ou règles de la femmes?; il n’y est pas spéc. question de la femme)]; 166,122 [flux dé flurs (bis), cf. → flus 1o, t. de méd.]; HMondB 53 [le sanc mestrueus ce sont les fleurs de la fame, ms. fo 9(8)rob]; 445 [le flus de sanc, dit flours ou menstrues, fo 30(29)voa]; Malad. des femmes R 32 (1903) 101 [Des flours dé femmes… flours (sim. à TrotulaTrin)]; etc.etc.[AmphYpP V 33,1-2 fo 125ro; PlacTimB4T p. 260; 268; 270], TL 3,1940; GdfC 9,631a; LevyTrés 114b; ANDEl flurs1; DMF fleur2 [toujours au pl.; ‘B.’ à transférer sous fleur 1.]; DG 1,1075b [‘famil.’; «Ne s’emploie qu’au plur.»]; FEW 3,643b [‘agn.’ par manque de doc., puis ‘dep. 1314’(7)])
- ◆mal de flors m. “écoulement de sang de la menstruation, règles”“id.” (1em. 13es., LapidclS 470 [La femme ki ne poet avoir Le mal de flors a son voloir, Enfumez l’en (de gaiet)])
- ◆flors vermaux m.? pl. “sang de la menstruation d’une certaine qualité (comme signe de maladie)” (mil. 13es., TrotulaTrinH 368+ [titre: Por flors vermaux. A la fïez avient a femme uns maux haïz, Aochement l’apelent, qui vient de la marris])
- ◆fleurs vermeilles f.pl. “règles” (ca. 1224, CoincyI44K 451 [(les femmes souffrent de maladies les rendant pâles) Maintes en muerent… Li drois nons est un peu vilains, Si l’enforrai por les vilains En ‘fleurs vermeilles’ et en ‘roses’ – Ce sont paroles assez closez(8)], TLF 8,980b [«qualifié de ‘vielli’ dans Ac 1718» se réfère à fleurs, pas à fleurs vermeilles; cf. avoir…])
- ◆avoir ses flors “avoir ses règles” (dep. 2eq. 13es., PlatPractH XIV 1 (HuntAgnMed 1,242); TrotulaTrinH 198+; 199 [poudres por fere avoir les flors]; RecMédCambraiS 85; [AmphYpL III 28, fo 72b(9); AmphYpP V 32,5 fo 125ro; V 36,1 fo 126roa], ANDEl flurs1; DMF , mal attesté, mais toujours vivant (Oud 1640 292 kalendrier; Ac 1718 1,670a; etc.))
- ◆estre en ses flurs “avoir ses règles” (1em. 13es. – fin 15es., LapidclS 855 [Femme ki trop est en ses flors, Se l'eve en (de l'ematite) boit, pert ses dolors]; LettrHippomS 73ro,3 [Orine de feme qui est en ses fleurs est aussi comme sans, ms. ca. 1300]; PlacTimT 284; 303; 305 [sont les fames en leur semaines et en leur flors]; [doc. 1390 RegChâtD 1,336,-3; PlacTimB4T p. 268 [Les femmes quy doibvent bien… concepvoir doibvent estre telles:… les pensees fermes, le courage joieulz et liberal, et le temps ou quel elles font l’oeuvre charnele n’est point contraire, combien qu’elles soient en fleurs]], ANDEl flurs1; DMF)
- ◆loc. verb. perdre ses flors “cesser d’avoir ses règles (par maladie ou grossesse ou au retour d’âge)” (2eq. 13es. – 2em. 14es.(10), LettrHippomS 84ro,4 [Se la feme a perdues ses fleurs]; TrotulaTrinH 65; 119; 132+; 134; 244; 407; 410; 577; 606; RecMédAvenceH 81 [[F]emme que at perdu ses flurs deit prendre (fumigations)]; [AmphYpP V 33,6 fo 125ro; RecMédTrinH 261], ANDEl flurs1)
●florté adj.
[ÉtymologieSans doute adaptation sémantique de floreté p.p. pris comme adj. “garni de fleurs”, cf. l’étym. supra. L’expression flortee infection n’a pas nécessairement le caractère de collocation. Pour le sémantisme du substantif, v. infeccion sous → infect (DEAF I 236,20).]
- ◆“qui est relatif aux menstrues” (déb. 14es. [ms. 1ert. 15es.], OvRemBiH 1420 [Il n’apertient pas que je die Que tu voizez gaitier t’amie Quant elle sueffre passion De la flortee infection, ms. pic.], Mts 1567a; DMF; ad FEW 3,644a)
(1)
Cette situation trouve un reflet dans TrotulaTrinH où l’introd. contient trois fois la graphie fleur, tandis que toute la suite plus spécifique emploie la graphie flor. Le vers 22, Dames l’apellent ‘fleur’ par engendrement, s’il est pris à la lettre, nous dit en effet que ce sont les femmes qui ont créé la métaphore fleur (d’une plante) > “écoulement/menstruation” par une identification de fluor/flor avec flos/flor. Dans la suite, l’auteur revient à ses moutons, se servant de la graphie flor en accord avec la vraie étymologie. Sa source lt. emploie à la place menstrua pl. partout et explique de même dans l’introd.: «menstrua… que vulgo aput eas [mulieres] ‘flores’ appellantur, quia sicut arbores sine floribus fructum non auferunt, similiter et mulieres sine floribus officio conceptionis fraudarentur».
(3)
À juste titre, un fiore sg., Sidrach, est déclaré collectif.
(4)
V. AmphYpP p. 66-73, où plusieurs termes sont définis de même, mais à tort.
(5)
Ces ‘localisations’ sont certainement à interpréter très diversement.
(6)
Le gloss. classe sous ce mot aussi fruis, 1174, se référant pourtant au fruit d’une herbe.
(7)
On peut aj. Enc 10,337b menstrues… On le nomme aussi fleurs, regles, ordinaires, &c.; Lar 1872 8,478c; LarI 4,561a; etc., toujours vivant à en croire le réseau. TLF 8,980b ‘vx’ résulte de ses sources sélectives.
(8)
Le texte est complexe (nos guillemets-apostrophes). L’att. a été relevée dans le TLF; elle y fait défaut sous rose. Cf. Rem. 1, supra, avec n.1.
(10)
Documentation ultérieure clairsemée: [Juan Huarte], trad. G. Chappuis, Examen des esprits, Rouen 1598, fo 188; Paré, Œuvres, Lyon 1664, 631, ch.61; Louise Bourgeois, Recueil de secrets, Paris 1710, 87, etc.