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rédaction: Lionel Boisvert
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gestre m.
Gdf 4,269b, à la suite de DC, définit ce mot: “sorte de bois des Indes, ébène”, se fondant sur l’attestation suivante: Item una crux de ligno dicto gestre, munita de argento deaurato cum crucifix de ebore 1335, Inventaire de la Ste Chapelle de Paris, reg. 1, pièce 7. Dans les Inventaires du Trésor de la Sainte-Chapelle, éd. A. Vidier, Mém. de la soc. de l’hist. de Paris, années 1907, 1908, 1909, cet item est désigné comme suit: a) BN fr. 2833, copie du 15es.. d’un inventaire établi selon toute probabilité fin de 13es.-déb. 14es.: une croix de gest[re] (corr. éd.) Mém. 1907, p. 201. b) Arch. Nat. JJF, fo 47, copie du 14es. d’un inventaire établi en 1335-36: una crux de ligno dicto gestre (il s’agit ici du passage cite par DC et Gdf), Mém. 1909, p. 300. c) BN lat. 17107, fo 12-18, original daté de 1363: quaedam crux de hybenns Mém. 1907, p. 238. d) BN lat. 17107, fo 57-67, original rédigé entre 1363-1377; une croix de hybenns Mém. 1907, p. 249. e) BN lat. 17107, fo 21-28, original rédigé en 1377: una crux de ybenns Mém. 1907, p. 234 n14. f) BN lat. 9941, copie contemporaine d’un document établi en 1480: una crux de hybenus Mém. 1907. P-319. g) BN fr. 4609, copie déb. 17es. d’un inventaire établi de 1573-1575: une croix de jaye Mém. 1908, p. 233. La forme gest dans l’inventaire du déb. 14es. est une variante du fr. → jaiet (dep. déb. 12es. < lt. GAGATES), variente attestée dès ca. 1268 (LMest, FEW 4,21a). Jaiet, frm. jais, désigne une variété de lignite d’un noir luisant et léger. L’auteur de l’inveitaire latin de 1336 n’a probablement pas compris le mot gest de l’inventaire antérieur sur lequel il se basait, ou s’il l’a compris, considérait le jais comme un type de bois (le jais brûle!), de là la formule: de ligno dicto gestre. Les auteurs subséquents ont cru qu’il s’agissait réellement de bois, et ne comprenant pas le mot gestre, lui ont substitué hybenns, ybenns, hybenus “ébene”, bois lourd, de couleur noire, pouvant presenter avec le jais quelque resemblance. On pourrait aussi supposer que le mot hybenns désignait effectivement le jais, si l’on considère que le jais et d’autres substances analogues sont parfois désignées sous le nom d’ ébène fossile (Encycl. 1778, XI, 577; Agricola, De Ortu et causis subterraneorum, Basileae 1546, p. 328). Quoi qu’il en soit, l’inventaire de 1573-75 rétablit sous la forme jaye le mot jais: il est intéressent de noter que l’auteur de ce dernier inventaire traduit mot pour mot l’inventaire latin de 1480, sauf pour le mot hybenus, rempláce par jaye. Il faut donc en conclure, semble-t-il, que DC et Gdf se sont laissés abuser par l’inventaire de 1336, où gestre est donné pour du bois, et se basant sur les inventaires subsequénts où gestre est remplacé par hybenns etc., ils ont défini gestre “ébène”. L’ed. A.Vidier, probablement sous l’influence de DC et Gdf propose à tort la correctioni de gest en gestre, dans l’inventaire fr. du déb. 14es. Gestre, à part la variante fautive de 1336, n’existe pas in français; fr. → jaiet (de même pour geest 1328 InvClemD 63).
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