DEAFplus
article imprimé
rédaction: Albert Gier
girer v.
[ÉtymologieDu lt. tard. GYRARE “cingere, circumire, vertere” (attesté depuis l’Italia, ThesLL VI2 2385; EM4 286b; Souter 167b), dér. du lt.cl. gyrus (< gr. ϒῦροϛ “ring, cercle” LidScott 364a). Le verbe subsiste dans presque toutes les langues rom., mais il n’est pop. qu’en it. (girare “far ruotare su se stesso, intorno al proprio asse; trascinare nel proprio movimento di rotazione; far roteare; voltare, etc.”, Battaglia 6,838c; cp. piem. giré “girare”, G. Gribaudo - P.E.S. Seglie, Dissionari piemontèis, G-N, Turin 1974, 403b; sard. ḡirare “girare, camminare in qua e in là, ritornare”, WagnerDiz 1,580b; eng. girar “laufen, kreisen”, Peer 199a; frioul. ‘zirâ “girare”, Pirona 1313b; sursilv. girar “drehen, umdrehen; sich drehen; etc.” VieliDec 295b) et en cat. (girar “girar, volver” dep. 13es., AlcM 6,296b). Par contre, esp. girar “moverse alrededor circulamente” mil. 15es., «vocablo apenas medianamente usado y de tono francamente culto», Corom 2,729a; port. girar dep. 15es., Mach2 2,1147b; aocc. girar “tourner (vieux)” Mistral 2,55; et fr. girer sont beaucoup moins usités que esp. port. volver, aocc. tornar, fr. tourner. Cp. roum. jur “giro, vuelta, rodeo, circuito, contorno” Cioranescu 4655. Mlt. girare, gyrare DC 4,70c; 146b; Latham 219b; Niermeyer 469a; Blaise 383b; BlaiseMAge 431b, est attesté dans des textes écrits en France; mais les premières occurrences de fr. girer se trouvent dans des œuvres composées par des Italiens. Une influence de l’it., ou du mlt. (pour les attestations de girer et de ses dér. dans un contexte scientifique) est donc probable. FEW 4,358b; REW 3937.]
  • 1o⁠v.n. “tourner autour” ([1379] impr. 1542, BonBergL 64 [Aultre fois, en temps d’esté, quand le soleil est ou signe de l’escrevice, il fait son orient plus vers septentrion. Et aussi fait il son occident et tournoye et gire plus grand partie de nostre emyspere, et est lors appelé orient solsticial. Aultre fois, en temps d’hyver, fait son orient au signe de capricorne, et se trait plus vers midy, et lors tourne moins; car il ne gire, ne va pas si hault, ne prent tant de la partie dudict emyspere ou semyspere, et adonc est appelé orient yvernage], TL 4,325 [cp. AalmaR 4891 sous → 2o])
  • 2o⁠v.n. “tourner en rond” (14es., Vie S. Clém. BN fr. 818 fo 293ra [Li anfant d’icelui giroient et torneoient avec celui dedenz par tote l’eyglise entre la multitude des homes et des moilliers oranz Gdf, vérifié dans le ms.]; ib. une autre attestation cp. ci-dessous sou girement; AalmaR 4891 [giro, ras… tourner, girer, ou sens 1o?]; Modus [Et sert le faulx laz de deux choses: l’une si est de tirer a soy, qu’il (le faucon) ne gire en l’arbre, l’autre si est que, se il estoit prins par les deux piez et il estoit encroé, il se porroit estendre et ouvrir le laz Gdf, selon l’éd. Blaze, feuillet 120; sens? Prob. erreur du copiste; ModusT 120,103 donne encroe “se cramponne” au lieu de gire (var. croe, groe)], Gdf 4,280a; FEW 4,358a [pour gi(i)ront AntAnW (745; 749, gloss. “tourner, errer”, d’où FEW), v. → gesir])
  • “décrire un mouvement circulaire autour de la terre (en parlant du soleil)” (francoit. 3eq. 14es., AttilaS VII 1593 [Sire - dist Zanfret - … Inçigner me le croy avant que ‘l solel gir]; PeiskerAtt 150)
  • ⁠v.a. “tourner” (ca. 1375, OresmeCielM 544,77 [en choses qui telement sont tournees et girees le plus pesantes se traient tousjours au melieu], Gdf 4,280a; FEW 4,358a)
  • ⁠v.pron. “se tourner” (francoit. 1298, MPolRustB 70,53 [Il ont si costumés lor cavalz qu’il se girent cha e l[a] ausi tosto com firoit un chien (MPolGregP I 195: se tournent)]; 70,55 [quant il (le cavalier) fuit plus tost, adonc se gire ariere con sun arche et fait grant coux de sajete]; 70,59 [quant les Tartars veont qu’il ont occis deus avaus lor ennimis et des homes austint, il se girent sor elz]; 131,21; etc., Gdf 4,280a; FEW 4,358a)
  • 3o⁠v.a. “avoir tant de tour, avoir une circonférence de” (ca. 1265ca. 1298, BrunLatC 1,24,2 [Et sachiés que la cités de Babilone gire environ  .lxm. pas (BrunLatChab 31 torne, var. gire)]; 1,109,1 [sans faille li cercles est environ  .vi. fois tant come li compas a de large, c’est a dire k’il gire (BrunLatChab 126 var. ms. 13es. torne)  .iiii. tans come il a d’espés. Et par ceste raison maintenant comme il truevent combien la terre gire (BrunLatChab 126 var. mss. 15es. torne, var. ms. 13es. dure) puent il bien savoir combien ele a d’espés]; francoit. MPolRustB 64,1; 120,13 [(les grant colunbres et celes grant serpanz) hi a de longues X pas que sunt groses [come une grose bote]: car elle girent environ X paumes]; 153,15; etc., TL 4,324; Gdf 4,280a; FEW 4,358a)
  • 4o“aller” (francoit. 3eq. 14es., AttilaS II 970; V 369 [Au mon rector, se in mon pais puir çir]; VIII 884; etc., PeiskerAtt 150)
girement m.
[ÉtymologieCp. it. giramento fin 13es., Battaglia 6,837a; aocc. giramen Rn 3,467b; cat. girament 13es., AlcM 6,296a.]
  • “tournoiement, recherche faite en tournant autour d’un lieu” (14es., Vie S. Clém. BN fr.818 fo 293ra [Endementres qu’il convertissent lor girement en pleur et girassent et alassent de rechief et de rechief et parvenissent o leur seigneur a leur dame la ou elle prioit Gdf, vérifié dans le ms.], Gdf 4,280a; TL 4,324; FEW 4,358a)
giracion f.
[ÉtymologieCp. it. girazione dep. 13es., Battaglia 6,844c; BattAl 1816a.]
  • “rotation, mouvement circulaire” (ca. 1375, OresmeCielM 544,79; 546,13; 546,32; 548,37/39 [Et ce est inconvenient dire que, au premier quant le monde fu fait, le mouvement ou giracion du ciel fist la terre descendre ou milieu, car pour quelle cause y descendroient les parties de terre maintenant et toutes choses pesantes puisque la giracion du ciel ne atteint ou approche de nous?]; 548,45; 602,27 [la giracion et isneleté du mouvement du ciel], TL 4,323; GdfC 9,699c; FEW 4,358a)
regirer v.pron.
[ÉtymologieAttesté en lt. chrét. (regyrare 2es., Blaise 708a), en mlt.: regyrare DC 7,102a; Latham 399b; Niermeyer 902a; BlaiseMAge 783b, se regyrare “se retourner” Niermeyer; BlaiseMAge. Cp. cat. regirar 13es., AlcM 9,293b, arag. regirar 14es., RH 16,250,147, aocc. regirar “retourner, revirer” Rn 3,468a. FEW 4,358b.]
  • “se tourner” (ca. 1265, BrunLatC 206,22 [Car li homme ont lor bonnes a quoi il s’esmuevent naturelement et entre quoi il se regirent et tornoient dedens le mi], TL 8,619; Gdf 6,742b; FEW 4,358a)
mfr. circumgiracion f.
[ÉtymologieLt.tard. circumgyratio 6es., ThesLL 3,1150; Souter 51b, lt.chrét. circumgiratio Blaise 153b, formé de l’adv. lt. CIRCUM “autour, à l’entour” + GYRATIO. Cp. lt. circumgyrare ThesLL 3,1151; Souter 51b, mlt. circumgirare, circumgyrare Latham 87b; Niermeyer 182b; Blaise 153b; BlaiseMAge 180b. Le subst. n’a pas survécu dans les autres langues rom.]
(circumgiracion OresmeCielM 448,71, circungiracion OresmeCielM 544,76)
  • “action de se mouvoir circulairement” (ca. 1375, OresmeCielM 448,71 [Et de corps sperique par soy  .ii. mouvemens peuent estre: un est cirumgiracion et l’autre volutacion ou titubacion. Le premier est quant tel corps est meu environ son centre, si comme un bacin qui tourne sus un bastonnet, et est dit en françois tournier ou virer, de girari; et ainsi sont meus les cielz epicicles dedens le ciel]; 544,76)
gyromancie f.
[ÉtymologieL’origine du mot est peu claire; la définition usuelle présuppose qu’il est comp. du gr. γύρος (d’où lt. gyrus) “cercle, rond” et du gr. μαντεία “faculté de prédire, divination”; mais *γύρομαντεία n’est pas dans LidScott, et il n’y a des attestations d’un mot gyromantia ni en lt.cl., ni en mlt. Il existe cependant un mot gr. γυρομάντἰϛ “one that divines from flour” 2es. av. J.-C., une seule attestation (douteuse), LidScott 364a (comp. de γύριοϛ “farina, pollen et de μάντης "diviner, seer, prophet"). On ne sait exactement comment la giromancie se pratiquait (cf. F. Boehm, dans Handwörterbuch des deutschen Aberglaubens 3,1239: «angeblich [!] eine Form der Wahrsagung vermittelst auf der Erde gezogener Kreise…»). Pour frm. gyromancie, v. FEW. CF. cat. giromància, adj. giromàntic Alcm 6,302a; port. giromancia 1873, Mach3 3,154b. Il faut distinguer gyromancie et → chiromancie, circomancie “divination qui étudie les lignes de la main”, GdfC 9,82c, FEW 2,632b; ciromance GdfC 9,739c s.v. gyromancie est sans doute une var. de ce mot. FEW 4,359a.]
(gyromancie OresmeDiv Gdf, geromancie OresmeDiv Gdf, giromance OresmeDiv Gdf)
  • “divination qui consiste à tourner en cercle jusqu’à ce que l’on tombe étourdi sur des lettres desposées au hasard, et dont on tire des prédictions” (ca. 1366, OresmeDiv ms. BN fr.994 [14es.] fo 24a [Deviner les choses ocultes par astrologie, par gyromancie ou par nigromancie Gdf]; ib. fo 25a Gdf; ib. fo 25c Gdf, GdfC 9,739c)
girovaïs m.
[ÉtymologieLt.tard. GYROVAGUS 6es. “rôdeur, vagabond”, ThesLL 62,2386; Souter 167b, mlt. gyrovagus Niermeyer 469a; DC 4,147a; Latham 219b, cp. mlt. gyrovagari, -are, s. girovagant ci-dessous; mlt. gyrovagatio “action d’errer ça et là” Latham 219b. Comp. de GYRUS et de VAGUS “vagabond”. Se dit d’une catégorie de moines, cf. egle de S. Benoît cap. 1: «Quartum vero genus est Monachorum quod nominatur girovagum, qui tota vita sua per diversas provincias ternis aut quaternis diebus per diversorum cellas hospitantur, semper vagi et numquam stabiles, et propriis voluntatibus et guilae inlecebris servientes…» (éd. A. de Vogüé - J. Neufville, t. 1, Paris 1972; c’est le texte traduit par la règle fr. citée ci-dessous; RègleCistG 589 traduit par u errans u tornieurs). Cp. port. giróvago 13es., Mach2 2,1148b, esp. giróvago Corom 2,729b, it. girovago dep. 14es., Battaglia 6,854b; BattAl 1817a. FEW 4,359b.]
  • “moines errants, sans résidence fixe” (déb. 13es., RègleSBenNicH 322 [Li quart moine sunt, ce m’est vis, C’on apele girovaïs, Q’il tant com il en vie sunt Par diverses contrees vont Por diverses celles cerchier Trois jors ou quatre herbergier. Tou tants sont vai, toz tans errant; Ne sunt estable tant ne quant; Lor propres deliz vont querant Et a gulosité servant. Sunt Sarabaïte en error, Cist sunt de tot en tot poior], FEW 4,359b; GdfLex 257c)
girovagant p.prés.
[ÉtymologieCp. aocc. girovagan Rn 3,468a. L’inf. fr. *girovaguer n’est pas attesté, cf. mlt. girovagari, -are “errer, jouter” 1166, Latham 219b; Niermeyer 469a; BlaiseMAge 431b; DC 4,146c.]
  • “se promenant çà et là” (ca. 1334, GirRossAlH 2418 [Mas tu, combien que soies hermites solitaires, Tes cuers girovagant va par plusors repaires], Gdf 4,282a; TL 4,336; FEW 4,359b)