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rédaction: Stephen Dörr
jehanot m.
[ÉtymologieDu nom propre afr. JEHAN (< lt.tard. JOHANNES, -EM; ForcelliniOnom VI 26a: «scribitur etiam saepe Joannes sine aspiratione») + suffixe fr. -OT à valeur diminutive (Nyrop 3 §§ 287-290). L’évolution de lt. jo- à afr. je- s’explique par un affaiblissement de la voyelle (normalement, on s’attend à un développement de lt. o à fr. ou; ce résultat, Jouhan(not) existe). Le n double est normalement conservé graphiquement (Jehanot p.ex. Taille1296M 47). –- Le nom Jehan (Jean) et ses dérivés connaissaient une fortune dans le lexique populaire dont témoignent des centaines d’exemples rassemblés par F. Cramer (Die Bedeutungsentwicklung von “Jean” im Französischen, 1931; Der Heilige Johannes im Spiegel der französischen Pflanzen- und Tierbezeichnungen, 1932)(1). Pour l’évolution sémantique qui mène du nom propre Jean à la désignation Jean à caractère péjoratif (pour des personnes niaises, etc.), v. Cramer Bedeutungsentwicklung 96: «Jedenfalls läßt sich aber deutlich erkennen, daß die pejorative Entwicklung unseres Namens erst auf dem Boden von Frankreich einsetzt mit einer Linie, die an die Häufigkeit des Personennamens anschließt und sich frühzeitig von jeder kirchlichen Tradition lossagt. Mit dem Sinken des Namens verstärkt sich die pejorative Tendenz der Typen in Gebrauch und Neuschöpfung»(2). Cette évolution n’est pourtant pas restreinte au domaine gallorom, cf. cat. janot “crétin”, CoromCat 4,876a (s.d.), esp. juanete, Corom2 3,531b (dès 1605; «diminutivo o despectivo de Juan, como nombre típico de gente rústica»), it. zanni, Battaglia 21,1054b («originatosi alla fine del sec. XV nelle compagnie comiche padane, dove era un poverissimo e ignorantissimo villano»), sard. gánni Volkst 1,79; cp. aussi all. Hansel. –- Pour mal saint Jehan v. → mal; pour erbe saint Jehan v. → erbe; pour la (feste) saint Jehan v. → feste; pour poirier jehanin v. → poirier.]
(jehannot doc. 1397 Gdf, juehennot ProstInv 1,287n3)
  • 1o“celui qui se conduit d’une manière niaise, nigaude” (1397; 1550; dep. Besch 1845(3), doc. 1397 [Le suppliant lui dist: Eudet, vous avés un toreau qui hurte les gens et ne osent aler aux champs pour luy. Lequel Eudet luy respondi: As tu nom Jehannot ? Ouyl, dist ledit suppliant, j’ay nom Jehannot voirement. Et ledit Eudet luy dist: Jehannot es tu, car a toy n’en appartient de riens, en le huchant plusiers fois Jehannot Gdf], Gdf 4,642b; TL 4,1614; DC 4,420c; Lac 7,104b; TLF 10,681b; FEW 5,45b)
  • ⁠adj. “qui se conduit d’une manière niaise, nigaude” (1397; 1881, doc. 1397 [: Jehannot es tu, pour le contexte plus large, v. ci-dessus], Gdf 4,642b; TL 4,1614; DC 4,420c; Lac 7,104b; TLF 10,681b; FEW 5,45b)
  • 2o“espèce d’arbre fruitier”(4) (1389, ProstInv 1,287n3 [pour .i. cent d’antes et arbres, c’est assavoir parmains, caloiaux, saint-règle, fransureaul, juehennot, poirier sucré… et pour pluseurs rousiers, lesquelz il a delivrez])
jehanote f.
(juharnote 14es. LettrHippoT p. 83)
  • “armoise vulgaire, herbe de Saint-Jean” (14es., LettrHippoT p. 83 [juharnote, sans contexte(5)], cf. anam. jehenette, aflandr. jenette, etc., FEW 5,48a)
johannien m.
[ÉtymologieFormé en partant de Johan, v. Flutre 112a, + suffixe nominal -ien (cf. Nyrop 3 §§ 246-247).]
  • “fidèle de l’apôtre Jean” (1164, CommPsia2G2 XLIV 605 [In honore non suo sed tuo, car un dist mie: Geo sui petriens (fidèle de saint Pierre), geo sui palliens (fidèle de saint Paul) ne johanniens, mais geo sui crestiens])
johannois adj.
[ÉtymologieCette graphie est attestée dans HerbCandF 4486. Emploi comme adj. du nom ethique Johannois qui désigne les Byzantins (synonymes des Sarrasins dans HerbCandF v. 8033n et TL 4,1712) + suffixe nominal -ois (cf. Nyrop 3 §§ 279-280 [dérivés de noms communs])]
(joanois HerbCandS 10829 var. ms. mil. 13es.; 11178var., johennois HerbCandS 10829; 11178, johenois HerbCandS 10955)
  • hauberc johannois “espèce d’haubert attribué aux Byzantins (déb. 13es., HerbCandS 10829 [De dan Tiebaut (un Sarrasin) prist armes et hauberc johennois]; 10955 [Folque joste a Bedel, qui d’Erië fu rois, que l’escu li perça et l’auberc johenois]; 11178, TL 4,1712; FEW 5,47b)
(1) Cp. aussi A. Dauzat, Les noms de personnes, 21932,57: «La généralisation des noms de saints comme noms de baptême est très remarquable à partir du XIIe siècle… Aux XIVe et XVe siècles, les noms des saints évangéliques… deviennent de plus en plus en faveur: Pierre, Jacques et surtout Jean gagnent ce que perdent les saints médiévaux au nom germanique».
(2) Cf. aussi janjan “mari trompé, cocu”, texte de 1654, FlutreMPic H 296; cf. aussi Jehan Boute Dieu, désignation du Juif Errant, AssJérPh R 19,100.
(3) Cp. aussi grand Jeannot “homme borné, simple” BL 1808, FEW.
(4) Très probablement un pommier ou un poirier; cf. FEW 5,47b: jannet, Lar 1873, qui désigne une poire; la désignation provient p.-ê. du fait que les fruits mûrissent vers la Saint-Jean, cf. Fr. Cramer, Der Heilige Johannes…, 30-32; cf. aussi FEW 5,47b: «Mfr. pomme de saint Jan “esp. de pomme qui mûrit vers la Saint Jean”», etc.
(5) L’éd.: «c’est l’herbe Saint-Jean».